L'afflux de plus d'un demi-million de personnes fuyant le conflit soudanais a provoqué une surpopulation dans les centres de transit de Renk, une ville frontalière du Soudan du Sud où plus de 300 personnes se partagent un seul robinet. Le manque d'eau potable et d'assainissement augmente le risque de choléra, avertit Oxfam aujourd'hui.
Plus de 1 500 personnes arrivent chaque jour du Soudan dans ces centres de transit. Aujourd'hui, plus de 15 000 personnes sont hébergées dans deux centres initialement conçus pour accueillir seulement 4 750 personnes. Nombreuses d'entre elles vivent dehors, des fois plus de 5000 personnes, sans accès à de l'eau propre ou à des installations d'hygiène adéquates.
Avant même le récent conflit, le Soudan du Sud comptait 1 027 cas de choléra. Les pluies, combinées au manque d'eau et d'assainissement, entraîneront une augmentation des cas de maladies. Actuellement, 100 personnes utilisent une seule latrine, soit deux fois plus que le nombre recommandé par les normes minimales.
Le directeur pays d'Oxfam au Soudan du Sud, Dr. Manenji Mangundu, témoigne :
"Je reviens de Renk où les gens sont entassés dans des abris dans des conditions effroyables. Beaucoup doivent faire la queue pendant des heures pour avoir accès à de l'eau potable ou à des toilettes. Sans une augmentation immédiate des financements, la situation va se transformer en une véritable catastrophe, exposant encore plus de personnes à des épidémies et à la faim. La saison des pluies qui approche (avril) entraînera le blocage des routes principales, ce qui freinera l'acheminement de l'aide humanitaire et limitera encore plus le transport des personnes vers les abris.
Plus de 80 % de la population du Soudan du Sud, soit quatre personnes sur cinq, requièrent déjà une aide humanitaire d'urgence. La succession de crises, marquée par cinq années d'inondations et de conflits dans certaines régions du pays, a déjà détruit la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes.
Bibiana Peter, une mère de cinq enfants qui a été forcée de fuir sa maison au Soudan et qui vit actuellement dans le centre de transit n° 2 à Renk, a déclaré :
"La faim est insoutenable. Mes enfants ne mangent qu'une fois par jour, s'ils ont de la chance. Leur repas se résume à un petit bol de lentilles pendant toute la journée, et je les vois souffrir à cause de la malnutrition. Je suis obligée de parcourir la forêt pour trouver du bois de chauffe, et je dois faire face à de nombreux dangers tels que les serpents et le risque d'être attaquée. Si j'ai de la chance, je vends le bois pour acheter un peu de nourriture. Sinon, nous dormons affamés et à l'air libre, ce qui favorise les maladies et l'insécurité.
La prochaine période de soudure (avril à juillet 2024) réduira les stocks de nourriture à leur niveau le plus bas, ce qui aggravera la situation déjà désastreuse dans la communauté d'accueil. Plus de 7 millions de personnes au Soudan du Sud sont touchées par la faim extrême, et parmi elles, 79 000 sont confrontées à des niveaux de faim extrêmes. Ce nombre a augmenté de 22 %, tandis que le nombre de personnes souffrant de faim extrême a plus que doublé.
Malgré l'augmentation du nombre de personnes fuyant le conflit au Soudan et l'aggravation de la crise humanitaire, le financement a été réduit à un niveau sans précédent. L'appel des Nations unies pour le Soudan du Sud en 2023 a été réduit de moitié par rapport aux années précédentes. Depuis le début de l'année, moins de 4 % des 1,79 milliard de dollars de l'appel des Nations unies ont été collectés. Ce manque de financement a considérablement freiné les efforts humanitaires.
"Alors que les grandes crises mondiales attirent l'attention, la crise du Soudan du Sud est reléguée au second plan. Mais le monde ne doit pas fermer les yeux. Nous menons une course contre la montre, mais aujourd'hui, les réductions de financement limitent nos capacités et nous mènent tout droit au désastre. Chaque jour de retard signifie des dommages irréversibles pour une population qui a déjà subi des années de dévastation et de privation", a ajouté M. Manenji.
Oxfam, en collaboration avec ses partenaires, a fourni de l'eau potable et des installations sanitaires adéquates à plus de 70 000 personnes dans les camps de transit, mais a besoin d'urgence de 7 millions de dollars pour multiplier ses opérations et atteindre 400 000 personnes en leur fournissant de la nourriture, de l'eau potable et des installations sanitaires.
Kamba Anthony | kanthony@oxfam.org.uk |+211916860790
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- La capacité actuelle des centres de transit de Renk (l'ancien et l'extension - communément appelés TC1 et TC2 respectivement) est de 4 750 personnes. Le TC Extension, d'une capacité de 2 750 personnes, accueille actuellement près de 15 000 personnes (près de quatre fois sa capacité d'accueil nominale).
- Le plan de réponse et de besoins humanitaires pour le Soudan du Sud en 2024 indique que 9 millions de personnes auront besoin d'une aide humanitaire au Soudan du Sud, dont plus de 1,6 million d'enfants qui risquent de souffrir de malnutrition aiguë.
- Le rapport IPC South Sudan Acute Food Insecurity Malnutrition Sep2023 July2024 confirme que 5,83 millions de personnes (46% de la population) sont actuellement confrontées à des niveaux de crise et de faim plus graves (IPC 3+), qui devraient passer à 7,1 millions pendant la période de soudure à partir d'avril 2024.
- Le plan d'intervention humanitaire du Soudan du Sud était financé à 51,4 % en 2023, selon la FTS d'OCHA. En 2024, à ce jour, le plan de réponse aux besoins humanitaires n'est financé qu'à hauteur de 3,6 % (au 27 février 2024).
- Les niveaux de financement de l'UNOCHA FTS pour 2014, 2015, 2016, 2017, 2018, 2019, 2020, 2021, 2022 montrent que 2023 a été comparativement le financement le plus faible fourni en proportion des besoins et même à la lumière du montant collecté.